Hello tout le monde ! Je profite d'avoir un peu plus de temps ce soir (cette nuit, mais chut), entre les fêtes pour venir rapidement poster le chapitre numéro 4 !
En guise de cadeau, je vous offre le chapitre le plus long de cette ff ^^ Mais c'est aussi l'avant dernier avant un prologue...
Pware : J'espère que tu ne sera pas déçue par cette phase "Dépression" ^^'
C'est aussi le chapitre qui contient le plus d'éléments de la série, parce que pour coller au mieux, j'ai repris carrément des situations et des dialogues haha... Mais c'était pour être au plus proche ^^
Sur ce, bonne lecture à tous !
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Chapitre 4
Dépression
Jamais il n’avait eu aussi mal. Pourtant, il avait déjà eu beaucoup de coups durs dans sa si jeune vie. Il s’en était toujours sorti, mais là, il avait cette impression de se noyer sans pouvoir rien n’y faire.
Cela avait commencé dès sa naissance : né d’une mère malade, et d’un père n’arrivant pas à assumer toutes les responsabilités que cela entraînait. Avant même de savoir ce que cela signifiait réellement, il était devenu
« l’homme de la maison ». Il était jeune quand son père était parti. Premier abandon. Celui-ci marqua Spencer profondément. Il ne s’en était jamais vraiment remis. Il a été ensuite élevé par sa mère. Il aimait profondément sa mère, et il la remerciait chaque jour pour avoir fait de lui ce qu’il était. C’est elle qui lui avait donné la passion des livres. Il a tout appris dans les livres, mais certaines choses de la vie ne s’y trouvent pas, et il avait dû se construire seul. Il avait traversé les humiliations, les harcèlements de camarades de classes jaloux et puérils. Mais il s’était toujours relevé. Il avait gardé la tête haute et avait réussi à entrer au FBI. C’était sans doute sa plus grande fierté. Il y avait rencontré des personnes formidables, sa famille, comme il aimait les appeler. Ils avaient toujours été là pour lui, même si souvent, il ne demandait pas d’aide. Quand Tobias Hankel s’en était pris à lui, il avait préféré se sortir de son addiction au dilaudid seul. Il savait qu’il pouvait compter sur ses amis, mais il avait eu besoin de sentir qu’il était fort, et qu’il pouvait s’en sortir seul. Mais il avait quand même eu de l’aide, sans la demander. De l’aide de celui qu’il considérait comme son père de substitution. Jason Gideon le considérait quant à lui comme un fils. Et pourtant, ce sentiment n’avait pas réussi à le faire rester parmi eux. Il était parti, sans rien dire, du jour au lendemain ne laissant derrière lui qu’une simple lettre. Deuxième abandon. Il s’était senti terriblement seul, et pourtant, il s’était relevé. La dernière fois qu’il avait cru ne pas pouvoir se remettre des épreuves de la vie était lors de la mort d’Emily. Il l’avait pleurée pendant dix semaines d’affilés. Si JJ n’avait pas été là, jamais il n’aurait réussi à faire ce deuil. L’émotion avait été tellement forte quand il l’avait retrouvée, il n’avait pas réussi à la gérer correctement. Il s’en était pris à Jennifer, alors que ça avait surement été encore plus difficile pour elle de ne rien pouvoir dire en voyant la détresse de son ami. Il s’en était pris à la mauvaise personne. Et il recommençait aujourd’hui. Quand il avait retrouvé son père, il ne voulait pas non d’aide. Mais encore une fois, elle était venue à lui sans qu’il n’ait eu besoin de la demander. Et quand il avait commencé à avoir des maux de tête violents, il s’était tourné vers quelqu’un d’extérieur. Il était comme ça, personne ne pourrait le changer.
Le chagrin, le choc, la colère, toutes ses émotions faisaient qu’il en voulait à la terre entière. Il s’en voulait à lui-même de ne pas avoir réussi à empêcher l’irréparable, il en voulait à son équipe de ne pas avoir réussi à la sauver à temps, et il en voulait à Maeve de l’avoir abandonné. Mais plus il y pensait et plus il se rendait compte qu’il avait tort. Il n’avait pas le droit d’en vouloir à toutes ces personnes. Sa famille avait été là, ils avaient tout fait pour tenter de la sauver. Ils avaient travaillés sur leurs temps libre au lieu de se consacrer à leurs familles ou se reposer entre deux enquêtes. Ils l’avaient toujours épaulé, même si cela sous-entendait de passer outre la hiérarchie et les ordres d’en haut. Il ne pouvait pas non plus s’en vouloir. Il avait fait tout ce qui avait été entre ses mains. Il avait été prêt à se sacrifier pour elle. Que pouvait-il faire de plus que de donner sa propre vie pour la sauver ? Quant à Maeve… De quel droit pouvait-il se permettre de lui en vouloir ne serait-ce qu’un seul instant ? Elle n’avait pas choisi ce qui lui était arrivé. Elle n’était en rien responsable des agissements de Diane. Elle aimait la vie, elle aurait voulu la vivre. Elle s’était battue de toutes ses forces. Jamais elle n’avait abandonné. Jamais.
La seule fautive était Diane Turner. Celle qui avait appuyé sur la gâchette, laissant partir la balle qui transperça sa propre tête avant d’atteindre celle de Maeve, les tuant toutes les deux sur le coup.
Ce n’est qu’au petit matin que Reid avait eu cette réflexion : il ne pouvait pas leur en vouloir. La nuit avait été longue. Entre instants de torpeurs et de colère, il parvenait parfois à fermer les yeux quelques minutes. Son appartement ne ressemblait plus à rien : plus aucun livre n’était présent sur l’imposante bibliothèque, les vases en morceaux ainsi que des verres cassés jonchaient le sol, si bien qu’il fallait faire attention à l’endroit où l’on marchait. Tout ce qui était plus ou moins petit était cassé où avait déjà volé à travers l’appartement. Spencer était à présent calme. Une sorte de coma éveillé l’avait envahi depuis quelques heures déjà. La colère était passée. La seule question qu’il se posait maintenant était de savoir s’il s’en remettrait un jour. Probablement pas.
Son bras lui faisait mal. Il n’avait pas pensé à cette douleur depuis qu’il s’était réveillé chez Morgan. Il se souvenait que vaguement du tir qui l’avait atteint. Il n’avait pas vraiment eu mal sur le coup. Il avait autre chose à penser, à faire. Mais aujourd’hui, cette douleur qu’il ressentait dans le bras semblait vouloir prendre la place de la douleur qu’il avait dans le cœur. Il se leva du coin où il avait passé un certain temps et se dirigea vers la cuisine. Il prit un verre d’eau et prit un antidouleur. Il n’était pas sûr que cela fasse effet, mais c’était toujours ça. C’est à ce moment-là que son estomac se décida lui aussi à le faire un peu plus souffrir. Il grondait de faim. Spencer ouvrit le frigo et aperçu tous les petits plats soigneusement préparés par Derek. Il n’avait pas envie de manger, mais il agissait instinctivement, pour survivre. Il attrapa une assiette de pâtes et en mangea trois fourchettes avant de remettre le reste dans le frigo. Il but encore un peu d’eau et se dirigea dans sa chambre où il se laissa tomber sur le lit. Il avait envie de dormir, mais apparemment, il y avait un manque de communication entre son cerveau et ses yeux qui refusaient de se fermer. Dès que le noir se faisait, il revoyait la scène de la mort de son âme-sœur. Il aurait voulu prendre quelques cachets pour l’aider à s’endormir, mais il les avait aussi jetés quand Maeve était entrée dans sa vie. Il avait aussi mal à la tête. Une migraine depuis quelques heures. Cela ne lui était pas arrivé non plus depuis qu’il l’avait rencontrée.
« Une raison psychosomatique », lui avait dit le médecin qu’il avait consulté quand il pensait avoir un problème au cerveau. Il avait raison. Même s’il ne se l’était jamais vraiment avoué, Spencer savait que ce médecin avait raison et ne s’était même pas étonné quand le mal de tête était venu.
Il ne saurait dire combien de temps il était resté allongé là. Mais il fut sorti de ses pensées par quelqu’un qui frappait à sa porte. Il n’avait envie de voir personne, et encore moins envie de parler. Il resta là, mais une voix s’éleva derrière la porte. Une voix calme, douce, et tendre qu’il reconnut immédiatement.
- Spencer, c’est JJ. Je sais que… Je sais que ce n’est pas facile pour toi… Mais j’espère que tu sais que ma porte t’est toujours grande ouverte. Je sais que tu n’as pas envie de parler, mais tu n’y es pas obligé. Si tu veux juste une épaule sur laquelle pleurer, on est tous là pour toi. Spencer, j’aimerai juste m’assurer que tu es conscient...
Spencer sentait de la peur et de la tristesse dans la voix de son amie. Il n’avait pas envie de lui ouvrir la porte, mais il ne voulait pas qu’elle s’inquiète autant. Il se releva de son lit, et se dirigea vers la porte d’entrée, contre laquelle il frappa deux fois pour indiquer à Jennifer qu’il était parfaitement conscient. Il entendit un soupir de soulagement, avant qu’elle ne reprenne la parole.
- Je repasserai. Les autres vont sans doute aussi passer. On veut tous t’aider Spence. On t’aime, tu sais…
Il entendit JJ repartir doucement. Il écouta les talons de son amie claquer sur le sol à chaque pas. Et Maeve ? Portait-elle des talons hauts ou était-elle plus baskets ? Il ne le saura sans doute jamais. Il l’avait souvent imaginé, habillé de façon très élégante, avec des talons pas trop hauts pour pouvoir être à l’aise dans son laboratoire, mais assez pour lui faire gagner quelques centimètres. Il l’imaginait que très légèrement maquillé, elle n’en avait de toute façon pas besoin. Juste histoire de mettre encore plus en avant ses magnifiques yeux. Quand Diane avait enlevé le bandeau, la première chose qui lui vint en tête fut de se dire qu’il avait raison, et que c’était la plus belle femme qu’il n’avait jamais vue, malgré son visage rougit et fatigué. Pendant une demi-seconde, il avait oublié où ils se trouvaient. Il n’oubliera jamais ses yeux. Jamais. Et tout ce qu’il avait réussi à dire était
« Salut ». Juste
« Salut ». Elle lui avait répond par ce même mot. C’était un instant hors de la réalité. Puis il atterrit. Elle avait des bleus et une blessure en sang à la tête. Discrètement, il avait essayé de voir si c’était grave ou non. Mais même avec ce sang qui coulait sur son visage, elle restait magnifique. En repensant à cela, Spencer senti les larmes lui monter aux yeux. Mais elles refusaient de couler. Elles restaient là, sans sortir. Il se rallongea sur le canapé, et s’endormit.
« Tu serais prêt à mourir pour elle ?! »Spencer se réveilla en sursaut, en criant
« oui ! ». Ce même
« oui » désespéré qu’il avait crié à Diane dans un dernier élan d’espoir pour sauver Maeve. Il eut tout juste le temps de remettre ses pensées en place, qu’il entendit de nouveau frapper à sa porte. Etait-ce la deuxième visite de la journée, où était-on le lendemain ?
- Reid… C’est moi. Enfin, je veux dire, c’est Penelope, commença maladroitement la voix. Je… Je ne suis pas douée pour ce genre de chose, tu le sais. Mais je veux que tu saches que je suis là pour toi. Enfin, tu dois sans doute le savoir, mais je voulais te le redire, tu comprends ? Question bête, bien sûr que tu comprends. Tu comprends toujours tout. C’est une chose que j’aime chez toi. On n’a pas besoin de te dire les choses plusieurs fois ou de te les expliquer. On perd souvent trop de temps à vouloir expliquer les choses aux autres, et souvent, ils ne comprennent pas toujours ce qu’on veut leur dire, ils comprennent que ce qu’ils veulent bien comprendre par rapport à ce qu’on leur dit et du coup… Bref. Je m’embrouille. Je ne suis pas douée quand il faut monologuer. J’aimerai juste te rappeler qu’une famille, c’est aussi là pour les moments les plus durs. J’ai préparé un petit panier, tu verras, il y a pas mal de choses différentes dedans. Je te le laisse devant ta porte, d’accord ? Spencer, s’il te plaît réponds moi, j’aimerai juste savoir si tu es en vie…
Comme pour la précédente visite, Reid frappa deux fois à la porte. Cela suffit à Garcia pour être rassurée. Elle repartit en laissant le panier qu’elle avait apporté devant la porte d’entrée de son ami. Peut-être le prendrait-il une fois qu’elle serait loin d’ici. Ou peut-être pas. Spencer n’avait pas envie d’ouvrir la porte. De toute façon, il n’avait pas besoin de ce que lui apportait Garcia, même si cela était une attention particulièrement touchante et agréable de sa part.
Le temps filait sans que Spencer ne s’en rende vraiment compte. Derek était venu quelques fois, mais ne disait jamais grand-chose. Il restait là, derrière la porte close. Il frappait et n’avait en retour qu’un bref écho. Mais il s’en contentait. Il connaissait assez son ami pour savoir qu’il allait lui falloir beaucoup de temps pour s’en remettre, et que de le forcer n’était pas une bonne idée. Il préférait donc lui laisser le temps et espérait qu’il serait plus enclin à décrocher son téléphone. Il ne comptait plus le nombre de messages qu’il laissa sur son répondeur. Parfois, il entendait qu’on décrochait, mais aucune voix ne se faisait entendre. Simplement de lentes respirations. Hotch était passé aussi. Il passait très rapidement, attendait un signe de vie de son agent et repartait. Il n’était pas à l’aise avec ce genre de chose, et préférait lui laisser autant de temps dont il aurait besoin. Rossi quant à lui était souvent venu. Reid entendait qu’il s’installait devant sa porte et lui racontait les dernières enquêtes, les nouvelles du bureau. Une fois qu’il terminait son monologue, il rangeait ce qui semblait être une sorte de tabouret portatif et repartait jusqu’à la prochaine visite. Blake n’était pas venue. Elle lui avait téléphoné bien sûre. Mais elle sentait bien que c’était inutile de tenter quoi que ce soit avant qu’il ne prenne lui-même la décision de venir se confier à ses amis. JJ et Penelope continuaient à passer régulièrement. Garcia apportait souvent des paniers, si bien qu’ils commençaient à s’entasser devant la porte du génie. Aucun d’entre eux ne le forçait et pour cela, Spencer ne les remercierait jamais assez.
Il passait son temps entre son lit, son canapé et le sol froid de son appartement. Il n’avait rien touché depuis qu’il s’était énervé et avait tout envoyé balader. Il savait où marcher pour ne pas se blesser, mais il arrivait régulièrement qu’il oublie et qu’un bout de verre vienne se loger dans l’un de ses pieds. Il mangeait peu, juste assez pour ne pas tomber, et compensait par l’eau, la seule chose qu’il arrivait à avaler correctement. Un jour, il s’était regardé quelques secondes dans le miroir et ne s’était pas reconnu : son visage était blanc, fatigué, ses yeux cernés de noir. Ses cheveux étaient encore plus en bataille que d’habitude, et ses joues creusées indiquaient qu’il avait perdu du poids. Déjà qu’il n’était pas bien épais, mais là, il se fit presque peur à lui-même.
Les jours étaient devenus des nuits, et les nuits des jours. Il dormait la journée et n’arrivait pas à fermer les yeux la nuit tombée. Il se réveillait et s’endormait sans s’en rendre compte, ne sachant pas à chaque fois combien de temps s’était écoulé. Il ne savait pas quel jour on était et depuis combien de temps il était là. Des fois, il ne se rendait même pas compter si on était le matin ou au beau milieu de la nuit, et les rideaux toujours fermés n’aidaient pas.
Souvent, il relisait le livre que Maeve lui avait offert. Il le connaissait par cœur, mot après mot, mais il aimait laisser ses yeux parcourir les lignes de ce précieux cadeau. Il regardait aussi souvent des photos de son amie que lui avaient déposées ses parents. Elle était tellement belle. Avec sa frange qui lui cachait parfois ses beaux yeux bleus, son sourire à vous faire fondre en plein hiver et son visage si fin, si parfait. Il les avait toutes gravées dans sa mémoire. Les Donovan avaient aussi déposés un objet qui lui tenait particulièrement à cœur : un foulard. Elle l’avait acheté peu de temps avant le drame. Il se souvenait encore du jour où ils avaient parlé de leurs relations antérieures. C’était le 4 novembre, à 15h46.
- Est-ce que… Commença-t-il d’une voix timide à travers le combiné. Je sais que ça peut paraitre indiscret mais, je… Enfin je…
- Mais tu quoi ? Lui répondit une voix douce. Spencer, tu sais que tu peux me demander tout ce que tu veux. Si je ne souhaite pas y répondre alors je te le dirai tout simplement.
- Je sais. Mais ce n’est pas facile pour moi de parler de ce genre de chose… Enfin. Je me lance. Je voulais savoir si tu avais eu beaucoup d’histoire dans ta jeunesse ? C’est indiscret comme question, désolé. Si ça te dérange, on n’en parle pas. Je n’aurai pas dû te demander, désolé.
- Ça ne me dérange pas d’en parler. Très peu. Si tu savais le nombre de vendredi soir que j’ai passé seule avec mon microscope.
- Je croyais que j’étais unique en mon genre, plaisanta en souriant Spencer plus détendu.
- Allez arrêtes, les filles devaient t’adorer au lycée.
- Les filles ne s’intéressaient pas à un gamin de 12 ans au lycée… Un jour, j’ai reçu un petit mot de la part d’une fille sur laquelle j’avais craquée. Elle trouvait que j’étais mignon, mais elle voulait que je porte un bandeau pour notre rencontre. J’ai accepté, et quand elle a retiré ma chemise, j’ai entendu des gens rirent, la plupart des grands étaient là… J’aurai voulu disparaitre de la surface de la terre à ce moment-là.
- C’est dégueulasse… Ils n’avaient pas le droit de te traiter comme cela. Mais tu verras, quand on va enfin se rencontrer, tu réapprendras à aimer Colin Maillard.Ils avaient continué à parler de tout et de rien encore quelques instants avant de raccrocher. Il n’était même pas au courant qu’elle avait acheté ce bandeau. Mais il comprenait mieux maintenant pourquoi Diane lui avait bandé les yeux quand il était arrivé. Est-ce qu’ils auraient vraiment utilisé cet objet ? Après tout, cela pourrait sembler un peu étrange. Mais qu’est-ce qu’il ne l’était pas dans leur relation ? Elle était tout aussi étrange que les deux personnes qui la partageaient, ce qui la rendait unique en son genre.
Spencer continuait à regarder tout ce que les parents de Maeve lui avaient laissé. Il s’arrêta sur un petit carnet, entièrement recouvert de petits dessins. Ses yeux parcourraient les pages : tous les dessins avaient un rapport à chaque fois avec une conversation qu’ils avaient eu. Il s’arrêta sur une page en particulier. Il y avait sur celle-ci des représentations d’objets impossibles. Dont un en particulier au centre de la feuille. Un triangle de Penrose. C’était au début de leur relation téléphonique. La conversation qui avait fait basculer les sentiments de Reid d’une profonde amitié à un sentiment tout nouveau.
- La géométrie euclidienne, affirma Reid sans prendre une seconde pour réfléchir.
- Je te pose la question de savoir ce qui pour toi parait le plus impossible à réaliser, et tu me réponds « la géométrie euclidienne » ? Lui répondit surprise, mais amusée, son interlocutrice.
- Oui, rigola le génie. En fait, je pense plus particulièrement aux objets impossibles. Quand j’avais 8 ans, j’en ai dessiné un grand sur une feuille. J’ai pris des mesures précises, et je suis allé prendre du bois dehors, et des outils que mon père avait laissés là. Avec ça, j’ai essayé de construire un triangle de Penrose. J’y ai passé plusieurs heures, mais je ne comprenais pas pourquoi je n’y arrivais pas.
- Tu n’avais pas encore lu tous les livres sur la géométrie conceptuelle ? Rigola Maeve.
- Ne te moques pas, je n’avais que 8 ans ! Répliqua-t-il faussement vexé.
- Tu sais ce que l’on dit ? Il n’y a pas de triangle de Penrose sans épines.Ils avaient ri tous les deux. Et c’est là qu’il avait compris que ce qu’il ressentait pour elle était plus que de l’amitié. Il était tombé amoureux de cette fille avec qui il ne faisait que parler. Elle le faisait rire. Elle lui faisait oublier toutes les horreurs qu’il voyait à son travail. Avec elle, il se sentait léger, apaisé, heureux. C’était elle qu’il aimait et personne d’autre. Dire à Diane qu’il était amoureux d’elle, passait encore. Mais devoir dire à Maeve, droit dans les yeux qu’il ne l’aimait pas, avait été sans aucun doute la chose la plus difficile qu’il eut à faire. Il voulait lui dire tout le contraire à leur première rencontre. Mais non, il avait dû lui mentir en la regardant droit dans les yeux. Ces magnifiques yeux bleus.
« Je ne t’aime pas. Désolé », lui avait-il dit.
« Je comprends », avait-elle simplement répondu. Reid était persuadé au plus profond de lui-même qu’elle avait compris son jeu, et qu’elle savait qu’il mentait et qu’il pensait tout le contraire. Elle était très intelligente. Elle ne pouvait pas ne pas avoir compris. Au moment où Diana avait passé sa main dans sa chemise, il s’était senti tellement mal, qu’il était presque heureux de porter un bandeau et de ne pas avoir à la regarder en face. Il ne voulait pas qu’elle voit ça, il n’avait pas le droit de la torturer psychologiquement par cette vision de celui qu’elle aimait en train de se faire caresser par une autre femme. Mais Spencer devait tenir bon. Jusqu’au moment où il ne réussit plus, leur bourreau l’ayant poussé à bout par le baiser qu’elle lui vola. Il ne pouvait pas faire semblant de l’embrasser amoureusement, quand ce n’était que de la haine qu’il ressentait pour cette personne. Il aurait voulu que ses lèvres se scellent à celle de Maeve. Mais c’était impossible : même un simple baiser ne leur avait pas été accordé.
Il resta dans cet état semi-comateux pendant plusieurs jours. Quand une enquête s’était présentée à ses amis, Penelope et JJ étaient passées le prévenir. Il les entendit discuter devant sa porte. Il était appuyé contre celle-ci, assit par terre et entendit Jennifer hausser la voix :
- Spencer, si tu nous entends, on veut juste s’assurer que tu vas bien.
- Frappe deux coups si tu es conscient, rajouta Garcia face au silence.
Il frappa deux fois contre la porte.
- Tu crois qu’il s’en remettra ? Entendit-il vaguement l’informaticienne poser la question.
- Un jour sans doute. Et il sait qu’on est tous là pour le soutenir, quoi qu’il arrive, rajouta JJ plus fort pour être sûre qu’il l’avait entendue.
- Oui, tout pareil.
Quelques secondes après, il entendit les pas de ses amies s’éloigner en direction des escaliers.
Il se releva et se dirigea vers son canapé. La table basse était remplie de livres en tous genre. Une tasse trônait au milieu de tous ces ouvrages. Il ne mangeait certes pas beaucoup, mais il ne pouvait pas se passer du café. Il attrapa le livre de Maeve et s’allongea le tenant comme un enfant tient son ours en peluche au moment d’aller dormir. Il ferma les yeux et se laissa glisser vers l’inconscient.
Il fut réveillé par la sonnerie de son téléphone une petite heure plus tard. Il laissa sonner : de toute façon, le répondeur avait été inventé pour ça.
« Vous êtes sur la boite vocale de Spencer Reid, merci de laisser un message »- Salut Reid, c’est moi. Encore.
Il n’eut pas de mal à reconnaitre la voix. Le « moi » en question n’était autre que Derek, qui lui téléphonait pour la énième fois. Spencer avait cessé de compter à quarante-deux. Il entendit la voix lointaine de Blake lui dire que le briefing allait commencer. Morgan répondit qu’il arrivait et reprit son message sur le répondeur de son ami.
- Bon écoute moi, tu peux m’appeler quand tu veux.
Et il raccrocha. Ses messages n’étaient jamais bien longs. Juste pour que Reid sache qu’il ne l’oubliait pas.
Il avait reçu un message de Penelope quelques heures plus tard, l’informant que l’équipe était en route pour San Francisco, où un tueur vidait le sang de ses victimes. Il se rendormit.
Encore une fois, c’est une sonnerie de téléphone qui le réveilla, un marteau dans la tête. Il se dirigea lentement vers la cuisine dans le but de trouver un antidouleur, mais le répondeur s’enclencha au moment où il passa devant son téléphone. Il entendit une nouvelle fois la voix de l’agent Morgan :
- Salut Reid, c’est Derek, j’aurai une petite question pour toi. Le tueur vide les victimes de leur sang et leur retire leurs paupières avant de les tuer. Ça te dit quelque chose ? Rappelle-moi.
Spencer s’arrêta. Il avait une idée. Elle lui était venue comme ça, d’instinct. Il n’avait pas réfléchi. Il avait juste eu l’idée. Sans même s’en rendre compte. Il se souvenait que Maeve lui disait souvent qu’il était fait pour ce travail, et pour aucun autre. Qu’il avait ce don de voir et de comprendre des choses qui échappent aux autres, et que c’était un don trop précieux pour ne pas l’utiliser pour faire le bien autour de soi. Elle lui dirait surement que l’idée qui lui était venue en entendant Derek, était parce qu’il était né pour ça. Une petite voix intérieure lui soufflait de rappeler son ami. Mais une force inconnue retenait son bras : se battre, mais contre qui ? La voix ou la force ? Se laisser dépérir ou tenter de reprendre le contrôle de sa vie ? Spencer ferma les yeux un instant. Cette voix… C’était celle de Maeve qui résonnait dans sa tête.
« Aide-les. Tu sais que tu le dois. Tu sais que tu ne pourras pas sans arrêt te passer de cela. Tu aimes ça. Tu aimes aider les autres. Tu es né pour, Spencer. Aide-les, ils ont besoin de toi, autant que tu as besoin d’eux ». Il rouvrit les yeux, soupira et se dirigea vers le combiné. Il fit le numéro de Morgan, et attendit quelques secondes qu’il décroche.
- Oui, je t’écoute, répondit Derek.
Il hésita encore un instant, puis se lança d’une voix monotone et peu articulée, sans doute l’effet d’être resté silencieux, seul dans son appartement depuis près de quinze jours.
- La cornée ou les pupilles ont été endommagées ?
- Non, selon Blake il se serait servi d’un instrument très tranchant.
- S’il fait attention à ne pas endommager les yeux, leurs champs de vision est surement ce qui compte pour lui.
- En clair, il veut qu’elles voient ce qu’il fait. Et toi Reid ? Rajouta-t-il après une courte pause. Comment ça va ?
- Je dois y aller.
Et il raccrocha. Il n’avait pas la force de continuer à parler et encore moins la force de répondre à cette question. Il se dirigea dans la cuisine et prit enfin le médicament qui devrait dans quelques minutes stopper le pic-vert présent dans son crâne.
Il était encore en train de se demander pourquoi il avait enfin franchi le pas de reprendre contact avec son équipe. Etait-ce la curiosité qui le poussait à vouloir les aider ? Ou la voix avait-elle raison et c’était sa nature profonde contre laquelle il ne pouvait pas lutter ? Que devait-il faire maintenant ? Travailler sur l’enquête ou les laisser se débrouiller sans lui ? Après tout, ils étaient tous aussi compétant les uns que les autres niveau profilage. Ils n’avaient sans doute pas besoin de lui… Pourtant, il ne pouvait s’empêcher de penser que si Derek lui avait demandé son avis, c’est qu’ils piétinaient et qu’ils avaient besoin d’un regard neuf sur cette affaire. Mais il ne se sentait pas totalement prêt à reprendre du service. Hotch lui avait donné autant de temps qu’il le voudrait. Mais s’il s’écoutait à cet instant précis, il prendrait tout le reste de sa vie. Cette impression de tomber dans un gouffre sans fin ne le quittait plus. Comment arrêter de tomber et remonter à la surface ? Peut-être Derek lui avait-il donné la solution en le poussant à reprendre le travail. Après tout, qu’avait-il à perdre à donner un coup de main, juste cette fois, depuis ici ?
Il décrocha de nouveau son téléphone et composa le numéro de l’agent Anderson. Il savait qu’il n’hésiterait pas à lui apporter les documents dont il avait besoin, se rendant souvent des petits services entre eux. Il n’eut pas à attendre longtemps avant que l’agent du FBI ne décroche.
- Agent Anderson.
- C’est Spencer Reid.
- Oh, agent Reid, comment allez-vous ?
- Je voulais savoir si vous pouviez m’apporter les documents de l’enquête sur laquelle mon équipe travaille en ce moment en Californie ? Demanda-t-il, ignorant la question de son interlocuteur.
- Oui, bien sûr ! Je peux vous apporter ça d’ici une heure.
- Parfait, merci.
Il lui donna son adresse et raccrocha. Spencer se leva, et décida qu’il était temps de récupérer les paniers que Garcia avait laissés devant chez lui. Il ne voulait pas que Anderson lui pose des questions à propos de cela. Il en entra cinq. Il savait que Penelope en avait déposé plus, car il l’entendait toujours passer devant sa porte, n’étant pas très discrète avec ses chaussures à talons aiguilles. Mais il soupçonnait sa voisine de palier de lui en avoir volé un ou deux. Anderson arriva une heure plus tard. L’échange fut rapide, et il eut la délicatesse de ne pas poser de question quant à l’état de son appartement et son état physique. Spencer l’en remercia mentalement. Il se mit rapidement au travail. Il ne se préoccupait que de l’enquête. Il avait besoin d’occuper son esprit, et quoi de mieux que de traquer un tueur en série ? Il travailla dessus pendant plusieurs heures, sans voir le temps passer. Il avait accroché une carte de San Francisco sur un mur, ainsi que des photos et divers documents. Les autres papiers avaient rejoint les livres sur le sol. Il partit sur plusieurs pistes différentes, tout en entament un paquet de noix que Garcia avait mis dans les paniers, pour l’aider à rester concentré. Cette affaire était très intéressante. Il aimait l’art, et tout ce qui y touchait. De fait, il réussit à se concentrer sur ce cas, plus facilement qu’il ne l’aurait pensé.
Il traça un profil géographique et eut une idée d’où chercher. Il regarda du côté de la fenêtre. Il semblait faire jour, de faibles rayons de lumière passaient à travers les rideaux tirés du salon. Mais l’appartement était toujours plongé dans une certaine obscurité. Quelle heure était-ce ? Pouvait-il téléphoner à ses amis maintenant, où le décalage horaire risquait de faire qu’il ne les réveille, alors qu’ils ne devaient déjà pas beaucoup dormir ? Il estima rapidement l’heure de la côte ouest et décida qu’il pouvait téléphoner maintenant. Il composa le numéro de Morgan, qui décrocha rapidement.
- Quoi de neuf Reid ?
- Si c’est l’art qui le motive, il est clair que les lieux où il dépose les corps se situent dans le quartier de Mission District.
- Attends, comment tu sais…
- Anderson m’a apporté une partie des fichiers.
- D’accord, d’accord, une petite seconde, j’appelle Garcia. Vas-y Reid, rajouta-t-il quelques secondes plus tard.
- Garcia, trouve la liste de toutes les galeries d’art de San Francisco.
- Reid, oh, je voulais… Comment tu vas ?
- Mieux, répondit Spencer après un court silence sans vraiment en être convaincu lui-même. Merci de t’en inquiéter. Et merci aussi pour les paniers. Les noix contiennent du magnésium qui aide à produire de la…
- Sérotonine, fini Garcia le sourire aux lèvres. Oui, je sais oui. Bon, il y a beaucoup de galeries d’art.
- Concentre-toi sur le Mission District.
Il raccrocha rapidement pour ne pas laisser le temps à ses deux amis de poser d’autres questions sur sa santé, sur son moral. Il attrapa le petit paquet de noix et se dirigea vers le canapé. Tout en en mangeant quelques-unes, il se demanda s’il devait aller les rejoindre. Il pouvait les aider d’ici, mais avait-il vraiment envie de rester seul dans le noir ? Et puis il était bien plus efficace sur place, et c’était moins une perte de temps que de lui transférer les dernières informations au fur et à mesure. Il écouta encore cette petite voix intérieure qui lui murmurait d’y aller, de reprendre sa vie en main, d’arrêter de porter ce deuil seul. Il avait des amis, et leur avait tourné le dos, rejetant leur amour et leur aide. Il s’en rendait compte maintenant. Il pensa à la douce Jennifer, qui avait toujours été là pour lui, et qui n’avait jamais jugé son moral que certains trouvaient parfois trop sensible. Elle l’avait toujours épaulé, jamais forcé à parler, toujours avec une douceur presque maternelle. Il pensa à Blake. Et si elle se reprochait le fait de l’avoir poussé à rencontrer Maeve ? Il pensa aussi à Hotch et Rossi, qui tous deux avaient déjà perdu leurs femmes. Ils pourraient sans doute l’aider à surmonter cette épreuve. Il pensa à Garcia, qui lui avait préparé tous ses petits paniers. Sa sensibilité faisait qu’elle devait tourner en rond dans son bureau en attendant de ses nouvelles, se demandant toutes les deux minutes ce qu’il faisait et comment il allait. Il pensa à Derek. Cet homme qui depuis son arrivé l’avait pris sous son aile, sans jamais le laisser tomber, en le protégeant comme on protège un petit frère. Toute l’équipe avait fait de lui un membre à part entière et non pas le petit jeune de la bande, fragile et sensible. Et il pensa aussi à Maeve. Elle aimait tellement la vie, malgré tout ce qui lui était arrivé. Elle n’aurait sans doute pas apprécié de le voir se laisser mourir de cette façon. Il devait se rendre à San Francisco, pour eux, pour Elle.
Il se dirigea vers la salle de bains, et prit une rapide douche. Il ne prit pas le temps de se raser, ou de brosser correctement ses cheveux. Il troqua son jogging contre un pantalon simple, et rajouta un t-shirt et un gilet en laine. Il attrapa quelques feuilles du dossier, qu’il glissa dans son sac à bandoulière, ainsi que de quoi tenir deux-trois jours et s’apprêta à sortir. Sur le pas de la porte, il se stoppa net. Il ne pouvait pas partir comme ça. Il fit demi-tour et prit le livre de Conan Doyle, qui ne l’avait pas quitté depuis l’enterrement de Maeve. Il le mit délicatement dans son sac et sorti de chez lui. Il faisait jour, et le soleil tapait fort. Il n’avait plus l’habitude de cette luminosité et mit quelques minutes à s’adapter à la lumière. Il n’avait pas envie de croiser beaucoup de monde, la foule des transports en commun l’inquiétait un peu. Il n’était pas sorti depuis deux semaines, et se retrouver directement plongé parmi la population ne lui plaisait pas. Il prit alors un taxi jusqu’à l’aéroport, où il profita de sa plaque d’agent du FBI pour éviter les longues files d’attente. Il prit son billet pour le prochain vol et attendit dans un coin reculé de la salle d’embarquement. Il ne pouvait pas desserrer son emprise de son sac, qu’il gardait précieusement tout contre lui.
Une fois dans l’avion, il sortit les papiers qu’il avait pris avec lui. Quelque chose lui échappait à propos du sang et de la façon dont l’utilisait le tueur. Il réfléchit à différentes pistes, et en mit plusieurs de côté. Il trouverait sans doute la solution avec le rapport du légiste qui devrait arriver en même temps que lui au bureau d’enquête. Etant plongé dans ses dossiers, Spencer ne vit pas le temps du vol passer. Il prit un autre taxi pour se rendre sur place. Mais arrivé devant l’imposant bâtiment, il se demanda finalement si c’était une bonne idée d’être venu. Si ça se trouve, ils avaient déjà résolu l’enquête et étaient déjà tous reparti. Non, ils l’auraient prévenu. Il ferma les yeux, respira un grand coup, et entra. Il arriva doucement derrière eux, alors qu’ils étaient tous réunis autour du tableau qui affichait les photos et les recherches de l’équipe. Il arriva au moment où Rossi posa une question.
- Pourquoi est-ce qu’il retirait le plasma ?
- Ça rend le sang plus épais, répondit Hotch. Plus pratique pour peindre.
Le plasma et les globules blancs séparés. C’était l’information qu’il manquait à Reid. Il élimina les hypothèses qu’il avait eues le temps de formuler dans l’avion et n’en retient qu’une seule. Il allait intervenir, quand Derek prit la parole.
- De quel type d’équipement il aurait besoin ?
- On peut facilement acheter une centrifugeuse sur le net pour environ deux cents dollars, lui répondit Blake.
- Pour quelle raison il séparerait le plasma du sang ? Demanda Hotch.
- Par habitude.
Il était intervenu sans même en prendre conscience. C’est quand il vit tous les visages se tourner vers lui qu’il se rendit compte qu’il avait parlé à voix haute. Hotch fut le premier à réagir à sa présence, suivit rapidement de Jennifer.
- Reid.
- Spencer. Salut.
JJ se dirigea vers lui et ne put s’empêcher de le prendre dans ses bras, comme pour s’assurer qu’il était bien présent devant eux. Reid répondit à son étreinte. Ils lui avaient manqué, et apparemment, c’était réciproque. Cela lui réchauffa un peu le cœur.
- Je ne m’attendais pas à ce que tu reviennes aussi vite. Tu es sûr d’être prêt ? Demanda le patron de l’équipe.
- Non, répondit-il sincèrement. Mais je crois que j’ai trouvé une piste. Notre homme est hémophile.
- Ça pourrait expliquer pourquoi il est aussi obsédé par le sang, tenta Rossi. Il ne peut pas saigner sans risquer de mourir.
- Ça explique aussi pourquoi il sépare le plasma du sang avant de commencer à peindre avec, continua Blake.
- C’est un remède assez ancien, précisa le plus jeune des agents. Certains hémophiles injectaient du plasma dans leurs blessures pour forcer le processus de coagulation que leur corps ne peut pas assurer de lui-même.
Derek prit son téléphone et appela Garcia, pour qu’elle les aide à réduire le nombre de suspects. Comme à son habitude, elle répondit rapidement.
- Je suis tout ouïe.
- Salut ma belle, il me faut la liste de tous les hémophiles de San Francisco.
- Oh, c’est vague, mon Dieu que c’est vague… D’accord…
- Pour nourrir une obsession aussi forte, intervient Reid, le tueur doit sûrement souffrir de la forme la plus sérieuse de cette maladie, c’est-à-dire la maladie de Christmas.
- Reid ! Je suis contente d’entendre que tu vas bien.
- Merci Garcia.
Spencer entendait dans la voix de Garcia son soulagement. Elle faisait partie de ces personnes qui souffrent en même temps que leurs proches. Il le savait et était content de l’entendre, et de se dire qu’elle pourrait dormir tranquille cette nuit.
Après avoir rajouté des précisions et après quelques recherches, Garcia fournit à l’équipe le coupable. Hotch donna l’ordre à l’équipe de se séparer en deux groupes, pour l’arrêter soit chez lui, soit sur son lieu de travail. En partant, Rossi fit une tape amicale dans le dos de Spencer, comme pour lui dire
« Merci d’être venu ». Blake lui sourit, et il ne put s’empêcher de la rassurer.
- Je vais bien.
- Je sais, lui répondit-elle simplement. Mais c’est bon de vous revoir.
Il lui fit un petit sourire timide. Elle qui avait rejoint l’équipe en dernier s’était très bien intégrée et ce qui arrivait aux membres de la famille la touchait autant que les autres. Hotch s’approcha à son tour de son agent.
- Tu n’étais pas obligé de revenir si tu ne te sens pas prêt. Ça te prendra du temps, j’imagine.
Spencer ne savait pas quoi répondre à cela. Du temps ? Combien de temps s’était-il déjà écoulé ? Combien en fallait-il de plus pour se remettre de la perte de son âme-sœur ?
- Oui, mais combien de temps ?
- Difficile à dire. Mais on est tous là pour toi.
- Merci.
Il se retrouva seul dans le bureau. Il serrait toujours contre lui son sac contenant le livre. Il ne pouvait pas le lâcher, c’était plus fort que lui. Il était content d’être venu. Il s’était senti utile et pouvoir voir l’amour de ses amis, et non de la pitié lui faisait un bien fou. Il s’installa sur l’une des chaises et n’eut pas beaucoup de temps à attendre avant que les membres de son équipe ne lui téléphonent lui disant qu’ils avaient arrêté le coupable et qu’ils allaient pouvoir rentrer à Quantico. Finalement, il n’aura fait qu’un aller-retour à San Francisco, mais c’était sans doute l’aller-retour qu’il lui fallait pour enfin commencer à entreprendre le chemin de la guérison.
A bord du jet, JJ s’installa en face de lui, et entama la conversation.
- Au total, j’ai compté cinq paniers.
- Oh, sept, lui répondit Spencer. Mais ma voisine, Madame Cavanaugh a dû en prendre un ou deux.
JJ eut un petit rire. Il se rendait compte à quel point il lui avait vraiment manqué. Mais il avait eu besoin de ces instants en solitaire. Il était comme ça : il devait d’abord être seul pour gérer les émotions trop fortes. Mais maintenant, il avait besoin d’eux. Juste de leurs présences. Derek arriva derrière JJ, et Spencer jugea qu’il était temps de s’excuser de l’inquiétude qu’il leur avait donné et de son comportement d’abord agressif, puis solitaire.
- Je suis vraiment désolé si j’ai été un peu…
- Spencer, l’interrompit Jennifer. Arrête.
Il la regarda reconnaissant. Il avait de la chance d’avoir des amis comme ça, qui le comprenaient et l’acceptaient tel qu’il était.
- Tu sais, lui dit Morgan, je ne voulais pas te forcer à venir nous rejoindre.
- Je sais bien.
- Ecoute, si tu as besoin de quoi que ce soit, dis-le nous.
- Si ça ne vous dérange pas, j’aurai bien besoin d’aide pour un truc.
- Tout ce que tu veux.
Il voyait dans le regard de JJ et de Derek de l’intérêt et qu’ils étaient prêts à tout pour lui. Il devait se reconstruire, il devait reprendre sa vie en main. Mais pour ça, il allait devoir rentrer chez lui et se retrouver seul face à ce lieu si froid et si sombre qui lui avait servi d’appartement ces quinze derniers jours. Il n’avait pas la force d’y retourner seul, et il ne savait pas par où commencer pour redonner à cet endroit un minimum de chaleur.
Le jet à terre, Spencer, JJ et Garcia s’étaient installés dans la voiture de Derek, qui les emmena chez Reid. Hotch avait encore un tas de papiers administratifs à remplir pour ses supérieurs, et Reid n’était pas aussi proche de Blake et Rossi que des trois autres. Ils ne mirent pas longtemps à arriver chez le jeune agent. Aucun d’eux ne fit de commentaire quant à l’état où se trouvait le lieu de vie de Spencer : des livres partout, des morceaux de verre, des papiers qui volaient à travers toute la pièce, des tasses posées un peu partout et des photos accrochées n’importe comment contre le mur… C’est dans le silence que tous se mirent à ranger. Ils commencèrent par ramasser les bouts de verres, pour que personne ne se blessent. Penelope ouvrit les rideaux, histoire de faire rentrer un peu de chaleur et de lumière. Tandis que certains décrochaient les cartes et photos des murs, les autres rangeaient soigneusement les centaines de livres dans l’imposante bibliothèque. A eux quatre, ils ne mirent pas longtemps à redonner un peu de vie dans cet appartement. Tous étaient fatigués, à cause de l’enquête et du décalage horaire, mais tous y mettaient de la bonne volonté, heureux que Spencer accepte enfin leur aide. Au moment de partir, Derek le prit dans ses bras, comme pour lui dire
« Maintenant, tout ira bien ». Garcia et JJ en firent de même, avant de se diriger vers la porte d’entrée. Il se retrouva alors de nouveau seul. Par la fenêtre, on pouvait apercevoir le soleil se refléter contre les fenêtres de l’immeuble d’en face. C’était une belle journée, il faisait chaud. Il se dirigea vers son sac et en sorti le livre de Maeve. Il l’ouvrit et passa ses doigts sur la fine écriture manuscrite.
« L'amour est notre vraie destinée. Nous ne trouvons pas le sens de la vie tout seul, il faut être deux pour y parvenir – Thomas Merton »
Il referma doucement son précieux livre et le glissa dans la bibliothèque, parmi les autres. Sa gorge était serrée, et un nœud lui tordait l’estomac. Il ne voulait pas la laisser partir.
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Voilà... La suite, très certainement l'année prochaine... Haha, que je suis drôle x)