Merci Emily!
Voici la suite et fin de cette Fanfiction...
Chapitre 5
« La douleur de l'âme pèse plus que la souffrance du corps. » Publius SyrusUn mauvais pressentiment parcourut son corps, la faisant frémir légèrement. Il s’enroula dans son ventre et finit par sortir dans un gémissement pitoyable. Sa tête était sur le point d’exploser et ses membres étendus sur un sol confortable mais froid semblaient être des entités à parts entières qui tressaillaient selon leur bon plaisir.
Elle ne savait juger si c’était vraiment le froid qui la secouait autant... ou si, simplement, la peur et l’impression d’un danger imminent y étaient pour quelque chose. Paradoxalement, elle restait allongée, inerte sur ce sol, à plat ventre... Malgré le présage de la mort qui était répandu à ses côtés, dans le salon.
Du sang.Emily s’éveillait mais gardait les yeux fermés, s’accrochant encore un peu au sommeil, à l’inconscience, redoutant la vérité.
Trop violente sans doute.
Ses yeux finirent quand même par accepter
la réalité -éclosion de deux fleurs fébriles et aussi sombres que les ténèbres qui régnaient dans la pièce- et elle remarqua la tache écarlate dans laquelle elle baignait.
Elle suivit le cours de cette rivière pourpre et sursauta en remarquant un autre corps près du sien. Il était tellement froid qu’elle ne l’avait pas remarqué, ni senti.
Elle se releva doucement sur les coudes et regarda la forme glaciale et fantomatique qui dormait à ses côtés. Elle vit d’abord un visage angélique, une cascade de mèches bouclées et
souillées de sang séché.
-R... eid...Elle s’approcha un peu et se raidit en remarquant la lame qui s’enfonçait profondément dans ses entrailles. Pic
monstrueux et incongru qui l’effraya. Glacée, elle prit son poignet et tenta de percevoir un pouls. Il était faible, irrégulier, mais toujours là.
Paniquée, elle lâcha ce bras qui semblait plus mort que vif et fouilla la pièce des yeux. Son regard s’arrêta sur un appareil noir, posé sur une table basse.
Un téléphone.Elle se leva en vacillant et courut jusqu’au téléphone. Elle arracha presque le combiné mais elle n’entendit qu’un silence plus profond encore que celui de l’appartement. Aucune tonalité. Les fils de l’appareil étaient coupés. Elle plongea une main fébrile et désespérée dans sa poche pour trouver son portable, mais elle ne rencontra que le tissu du pantalon.
Emily ne comprenait pas ce qui s’était passé. Ni ce qu’elle faisait ici, chez Hotch, à côté d’un Spencer poignardé.
Et où était son patron ? Ne voyant aucune réponse lui venir à l’esprit, elle lança un second regard circulaire à la pièce et vit rapidement l’entrée.
Sortie, dans son cas.
Elle courut jusqu’à la porte de l’entrée et trébucha sur la main mollement étalée de Reid qui semblait vouloir la retenir près de lui, de son sommeil trop profond pour être bénéfique.
Elle fut parcourue d’un frisson horrifié, mais continua à marcher vite. Pour Spencer. Et puis...
Peut-être que le tueur était toujours ici... Il fallait qu’elle trouve rapidement de l’aide. Haletante, elle arriva devant sa seule chance de sortir et porta une main tremblante sur la poignée froide. Elle tenta en vain de la tourner, de la faire céder en la serrant plus fort, mais finit par lâcher prise, consciente de sa
défaite.
Elle était enfermée dans l’appartement.Son cœur battait douloureusement dans ses tempes. Fallait-il hurler ? Fallait-il se cacher ? Y avait-il encore quelqu’un ici ? Quelqu’un d’autre que Spencer et elle, du moins...
Elle trembla un peu, contre la porte qui était fermée sur son unique moyen de fuir, tentant de se remémorer tous les gestes d’autodéfense qu’elle avait appris en entrant au FBI.
Elle lâcha doucement la poignée, respira profondément et repartit le plus silencieusement possible sur ses pas. Elle aurait voulu retirer le couteau du ventre de son collègue pour avoir une arme à brandir contre un possible assaillant. Mais elle savait que ce couteau l’empêchait de se vider de son sang...
Il bloquait l’hémorragie. Elle chassa donc cette mauvaise idée et lança un regard inquiet vers le benjamin de l’équipe. Si elle ne trouvait pas vite la clé de cette foutue porte, il allait mourir. Un élan d’anxiété la parcourut. Electrique, il la fit doucement trembler.
Peut-être n’y avait-il pas de clé à l’intérieur.
Peut-être fallait-il crier.
Prentiss dut alors se battre violemment contre son besoin primaire d’expulser la peur : il lui fallait d’abord être sûre qu’ils étaient seuls.
Les sens en alerte, le corps tendu comme une corde d’arc, elle balaya encore la pièce du regard à la recherche d’une arme, quelconque. Elle prit un vase allongé capable de tenir dans une main. Elle espérait trouver mieux. Surtout si le tueur avait son arme... Et celle de Spencer.
Emily avança alors d’un pas circonspect vers sa droite, vers d’autres pièces. Elle manquait d’air, se forçant à respirer peu et dans un silence torturant. Elle avait mal au cœur et avait l’impression de distinguer à chaque seconde des ombres passer dans son dos. Son imagination et sa terreur se liaient contre la conscience fragile qu’elle avait des événements. Elle vit une lumière et se dirigea vers cette lueur blafarde, seul espoir dans cet infernal appartement.
Emily déboucha alors dans la cuisine et dut se mordre violemment le poing pour ne pas hurler. La surprise passée, elle fut secouée de sanglots nauséeux qui lui retournaient atrocement les tripes. Elle ne pouvait cependant pas décrocher les yeux de
cette poupée de sang qui gisait sur la table de la cuisine, éclairée par un lustre.
Elle pataugeait dans l’hémoglobine... dispersée en flaques, en éclaboussures. Le sol carrelé de la cuisine en était devenu sinistrement glissant. Elle s’approcha, tremblante, comme un zombie et prit doucement le bras de Rossi. Elle découvrit rapidement un pouls. Elle lança un regard hagard et perdu sur le tronc de cet homme.
Le ventre et le torse étaient striés, rouges, vifs, couverts de cloques, de brûlures, de lambeaux de chairs qui pendaient mollement sur une peau d’où
suintait encore l’atrocité du moment passé.
Son estomac remonta brutalement dans sa bouche et elle vomit de la bile dans le sang de son collègue. L’odeur infecte du liquide incarnat se mêlait à celle non-moins délicate du contenu de son estomac. Elle tremblait de tout son corps, n’arrivant plus à aligner ses pensées.
Un type s’en était pris à Spencer et Rossi. Avait-il attaqué le reste de l’équipe ? Etait-elle
le dessert ? Son cœur semblait s’être décroché et manquait des battements dans sa terrible envolée. La peur entière glissait dans ses veines glacée d’horreur. Elle recula doucement, pour s’éloigner de cette lumière aveuglante, horrible,
qui la scrutait... Qui la mettait en évidence.
Elle avait envie
d’hurler. Elle
avait besoin d’hurler. Elle serra brutalement les poings et le vase se rompit dans sa main, éclatant dans un énorme bruit de vaisselle brisée. Elle sentit son sang goûter dans l’entrée de la cuisine, dégoulinant de manière écœurante sur la moquette qui la menait dans un autre couloir. Elle n’y fit pas attention... Et gardait les morceaux coupants dans sa paume déchirée. Elle ouvrit la première porte et vit la baignoire dans laquelle gisait JJ. Elle referma doucement la porte pour laisser la jeune femme blonde à un sommeil peut-être définitif. Elle continua et vit encore deux portes. Elle ouvrit la première.
L’obscurité était encore plus forte que dans le couloir et elle ne distinguait que vaguement un corps dont les jambes étaient en morceaux. Il était allongé sur un lit... Elle reconnut Morgan. Elle ferma la porte,
hébétée. Emily arriva enfin à la dernière porte. Elle savait qu’elle trouverait Hotch. Etendu dans une position grotesque,
à moitié mort. Peut-être accompagné du tueur. Mais elle était prête à se battre, avec n’importe qui... Pour sa vie. Pour celle de ses collègues.
Elle poussa le battant et eut un hoquet de surprises. Assis sur un lit d’enfant, couvert de sang de la tête au pied, débraillé, le regard fuyant et fou, Aaron Hotchner tenait fermement une batte de baseball dans ses mains. Il lui lança un regard vide et se leva.
-M...on... Dieu... Hotch... Les autres... ils... ils sont...Une voix atone sortit de la bouche de son patron.
-Massacrés ? Presque morts ? Morts ?Emily ne comprenait plus rien.
-Euh... Vous... vous n’avez rien ?...Il s’approcha d’elle et Emily remarqua que la jointure de ses doigts devenait blanche tellement il serrait fort la batte.
-Ce n’est pas la question. La question... Soit... qu’ai-je à avouer ?... Soit... combien de temps vas-tu mettre avant de fermer les yeux ?Elle écarquilla les yeux, perdue, ne voulant pas comprendre.
-H... otch... Il... Il faut qu’on... sorte... Qu’on appelle les secours...Il secoua la tête.
-Tu n’as rien compris.Elle sentit le coup plus qu’elle ne le vit arriver et dans un bruit mat et horrible, elle le reçut violemment dans l’estomac. Pliée en deux de douleur, elle tomba au sol et haleta de manière erratique.
Elle se traina dans le couloir. Il la rattrapa facilement. Il la frappa encore, dans le dos, cette fois. Un long cri sinistre répondit au craquement de ses côtes. La douleur l’aveuglait et elle tomba à plat ventre. Les poings serrés sur les morceaux du vase. Une main la retourna brutalement et elle vit que le visage de son patron était déformé par une
folie effrayante. Dans un réflexe vital, elle enfonça brutalement un long fragment de porcelaine dans le ventre d’Hotchner. Celui-ci hurla et recula vivement, permettant à Emily de se lever et de courir jusqu’au salon, oubliant les lancements provoqués par les deux violents coups reçus.
Aucune issue.
Aucune. Elle se mit à pleurer en arrivant dans la pièce dans laquelle reposait Spencer.
Des pas approchaient. Fébrile, elle balaya encore une fois la pièce et attrapa le téléphone. Elle se sentait absurde, mais elle trouverait bien autre chose pour l’arrêter par après.
Du moins, elle l’espérait.Son patron entra dans la pièce, le visage tiré par la douleur. Il n’avait pas pris la peine de retirer le morceau qui dépassait maintenant de son abdomen. Elle lui balança de toutes ses forces le téléphone mais il eut le réflexe de protéger son visage de son bras.
-HOTCH ! NE M’APPROCHEZ PAS !Elle se dit que peut-être si elle hurlait, les voisins allaient réagir. Les traits de son patron étaient déformés par la colère, désormais. Il marcha droit vers elle. Emily tenta de courir dans l’autre coin mais Hotch lui décocha un énorme coup de batte en pleine poitrine. La jeune femme poussa un cri de douleur et se retrouva une nouvelle fois à terre. Sans défense. Aux pieds d’un
fou. Un sifflement déchira l’air et s’abattit sur elle avec force. Les coups vinrent de partout. Les cris étaient insuffisants pour égaler la douleur qu’elle ressentait. Il la retournait dans tous les sens pour la frapper partout, pour
broyer tous ses os, pour
meurtrir chaque parcelle de peau... Jusqu’à ce que l’inconscience gagne le combat qu’elle menait contre un homme plus fort...
Et armé de folie._________________________________
Des claquements étouffés par une moquette épaisse s’approchaient doucement, dans un silence
funeste et glacial.
Tout de rose vêtue, Garcia avançait allègrement dans un couloir. Il était 5h du matin... mais elle avait reçu un message urgent de son patron.
En plusieurs années, elle avait appris une chose essentielle : il ne fallait pas faire attendre un profiler. Encore moins
Aaron Hotchner.
Elle arriva enfin devant sa porte, légèrement endormie. Elle se donna deux bonnes claques pour se réveiller et frappa. La porte qui n’était pas fermée s’ouvrit dans un grincement sinistre. La joyeuse informaticienne trembla légèrement devant cet étrange et sombre présage. Elle passa doucement sa tête dans l’entrebâillement.
-Euh... Monsieur ? Il faisait très sombre dans l’appartement. Après une longue hésitation, elle décida d’entrer et d’allumer une lampe. Elle poussa donc la porte, tâtonna le mur de droite et appuya sur un interrupteur.
Un long cri annonça la lumière. Un énorme œil de sang l’observait du mur en face d’elle. Horrifiée, elle baissa doucement les yeux et remarqua de nombreuses traces écarlates. Tremblante, elle sortit son portable et appela les secours... Les mots vinrent comme des automatismes... et une fois dits, ils s’effaçaient de sa mémoire.
Elle avança, secouée de spasmes, tout en gardant les secours en ligne. Elle étouffa un hoquet d’horreur. Emily gisait dans une flaque de sang... Son regard suivit les traces de pas qui s’éloignait du corps de sang et elle vit Hotch, couvert de sang, qui riait tristement en tenant Reid dans ses bras. Il semblait au bord de la crise de folie.
-M...Monsieur... ?...Hotch lui lança un regard perdu et brisé.
-J’avoue... J’aurais dû... accepter le marché.Il se mit à nouveau à rire de manière grotesque, brisé, en miette, aussi humain que le Reaper était sensible.
Son rire convulsif et douloureux se transforma vite en sanglots de honte et en cris horribles. Il serra encore le corps de Spencer contre lui, comme
une poupée de chiffon.
-Je... suis... désolé... Désolé... Ils... ils n'avaient rien demandé...Garcia lâcha son portable qui tomba sans un bruit sur la moquette trempée. Elle était observée par des murs éclaboussés dont les oreilles étaient déchirées par les cris de personnes innocentes piégées par les sentiments qu’elles portaient à leur patron.
N’y avait-il plus grande torture que de voir, de subir et de ne pouvoir rien faire ?« Comme la nuit paraît longue à la douleur qui s'éveille. » Horace___________________________
Epilogue
Ses yeux parcouraient attentivement et pour la énième fois les mêmes lignes.
Des frissons de plaisir le submergeaient à chaque lecture.
« ( ...) Suite à l’agression que Monsieur Aaron Hotchner a subie et après une évaluation psychologique approfondie, j’ai le regret de vous annoncer qu’il sera dans l’incapacité de remplir ses fonctions durant une période indéfinie.
En ce qui concerne les membres de l’unité, leur état physique parfois préoccupant laisse entendre qu’ils ne pourront pas reprendre, pour la plupart, le travail avant plusieurs mois.
Nous vous enverrons leurs dossiers médicaux dans les prochains jours.
Cordialement, Dr Packson, Hôpital de La Pitié. »Tuer était facile. Pousser un homme à
la folie, par contre... L’excitation que provoquait cette lettre dérobée le faisait frémir agréablement. Il imaginait l’Agent Hotchner fou et brisé dans un lit blanc d’hôpital... Avec des souffrances indélébiles aussi bien sur le corps que dans l’âme. Il lui avait fait commettre
l’irréparable... et l’Agent Hotchner y avait mis un
zèle ahurissant.
L’Agent Emily Prentiss, cassée, dans un profond coma.
L’Agent Morgan, sans doute handicapé à vie.
L’Agent Rossi, bon pour des dizaines de greffes de peau.
L’Agent Reid, vidé de sa confiance en autrui par deux coups de couteau.
L’Agent Jennifer Jareau, couverte d’engelures...
Certes, il n’y avait eu aucun mort...
Mais parfois, elle semblait préférable à une vie forcée et broyée. Foyet poussa un soupir de contentement et posa le dossier sur la table de cuisine bancale de sa chambre de motel.
Qu’Hotchner ait refusé le deal avait finalement été... une
très bonne chose. Cela avait été,
très distrayant.
« La douleur est un siècle et la mort un moment. » Jean-Louis Baptiste GressetFin.